past life

Il était planté comme un arbre enraciné errant dans une forêt dont il n'avait jamais connu l'existence, couvert d'une épaisse nappe obscure au-dessus de lui. Il ne savait tout d'abord pas où s'orienter, confus par  toutes sortes d'idées amphigouriques. Tout d'abord en bruit de fond, les lamentations formèrent finalement un mur auditif désastreux le coupant de toute sainteté d'esprit. C'était des beuglements de femmes sensibles à des porcs qu'on emmenaient à l'abatoir, le suppliant à l'aide, passant leurs bras rachitiques autour de son corps finement musclé, lui tailladant profondément la peau jusqu'à en faire couler le sang. Il était nu et en proie à une sombre tristesse, victime de ses propres tourments et ceux des autres, se lacérant le crâne de ses ongles plantés dans le derme de sa tête, comme pour se débarrasser de l'intérieur qui le ronge. Comme si pour couper le mal à la racine, il devait s'arracher son propre intérieur pour en sortir son maléfice.

"Nam... Nam... Sauve-nous."

Dans un linceul de brume recouvrant de plus en plus les environs de par son opacité, le jeune homme était brièvement capable de déceler des masses informes se mouvoir dans la noirceur. Leurs mouvements semblaient bien plus difficiles à opérer que le déplacement de l'odeur âcre du sang coulant à flots venant piquer les narines de la noblesse. Cette odeur âcre qui venait lui piquer la gorge à lui en faire vomir. Comme si une main gangrenée venait racler l'intérieur de sa gorge de ses ongles écorchés.
Les yeux fermés comme un enfant en proie à une peur persistante, Liam fut transbahuté dans une autre dimension. Un autre temps, une ancienne ère révolue. Des cris de bébé parvinrent à ses tympans maltraités. C'était les siens. Les yeux désormais ouverts non sans crainte, il vit une femme fraîchement dépouillée de sa vie. Morte, la peau refroidissante, à ses pieds un bébé couvert de sang et un médecin coupable à son chevet. Le jeune marquis s'avança près de la femme. Elle était morte. Morte, mais si belle. Même dans son regard vide de toute vie et toute consistance, elle semblait majestueuse. C'est donc cela de mourir en donnant vie à quelqu'un ?

L'hémorragie ne connut une fin qu'une fois la totalité du sang vidé des parties génitales de sa génitrice, couchée sur la table, la sève écarlate coulait de celle-ci avant de procéder à un rapide périple jusqu'au sol, où les gouttes éclatèrent toutes les unes après les autres dans une symphonie macabre. La fin d'une vie en annonçait une nouvelle, sous le regard cupide du docteur qui prit le petit nourrisson dans ses bras, le regardant dans les yeux. Rare étaient les enfants qui ouvraient les yeux dès leur premier instant et pourtant, c'était le cas du fils Nam dont sa première découverte visuelle fut le corps meurtri de sa mère. Il respirait doucement. Il n'y eut pas de cri de bambin ce soir là.

"Tu m'as tué, Seung-Ji. Tu m'as tellement fais souffrir..."

Les mains mouchetées de tâches sanglantes qui semblaient désormais indélébiles, le jeune homme se mit à crier son opposition à cette déclaration. Mais au moment d'hausser le ton, les yeux de sa mère devinrent entièrement noir et elle se mit à répéter un nombre incalculable de fois la même sentence. Nam s'enfonçait toujours un peu plus dans la folie après chaque répétition, sentant son coeur le lâcher et sa raison l'abandonner, criant à la fois de haine et riant de désespoir, la gorge déployée mais pourtant capable  d'en sortir uniquement des pauvres sons étouffés.

Il commença à s'étouffer jusqu'à en cracher du sang sur le carrelage blanc de l'hôpital. Ainsi, la mère et le fils purent se retrouver, unis dans cette flaque d'hémoglobine dans lequel s'effrondra le jeune héritier la tête la première.
Il avait fini par se réveiller de force en entendant une nouvelle fois son nom crié par une voix féminine. Il se faisait griffer le torse par une femme qui essayait de s'accrocher à lui pour ne pas être embarquée de force par une chose immonde. Elle fut emmené dans une obscurité sombre dont le misérable ne put en saisir une nuance. Il s'approcha doucement, un pas après l'autre vers le lieu maudit d'où s'échappait des couinements de souffrance. Un mélange ignoble entre un désespoir mortel et une souffrance physique. Au moment de se fondre dans la pénombre, Seung-Ji fut transporté dans une chambre. Il était exposé à cette scène qu'il redoutait tant. Celle qui était venue mettre un coup de grâce à son ancienne existence.
Cette infâme créature était son propre père. La femme était plaquée contre le lit de force, dans l'impossibilité de se mouvoir et de se débattre. Elle était écrasée par le poids de son agresseur, destinée à subir encore et encore son châtiment toute la nuit durant, donnée en sacrifice à celui qui était son beau-père. C'était la première compagne du beau jeune homme, Anna, dont les cris ne semblaient pas parvenir aux oreilles de son bourreau qui prenait plaisir à souiller son corps, son âme, sa vie.

Face à ce sordide spectacle, le richissime hurla le nom de sa belle avant que toute cette scène morbide finisse par s'arrêter d'elle même, comme si le temps s'était suspendu. Le visage de sa fiancée semblait toujours autant souffrir pourtant. Sa douleur était condamnée à être éternelle. Une main masculine et marquée par l'âge se posa sur son épaule qui fut prise d'un frémissement parcourant le long de son échine. De l'ombre sortit le son de la voix de son père.

"Je t'ai toujours détesté, Seung-Ji. Parce que tu m'avais pris ma femme. Elle était la seule chose qui m'avait fait sentir différent. Avec elle, je n'étais pas comme ça... Je t'en ai voulu. J'ai toujours voulu te faire payer. Je l'ai fais. Mais j'avais tords."

Il fut une nouvelle fois transbahuté dans une autre époque. L'année dernière. Il se trouvait devant le cadavre de son père jonchant dans le sol, noyé dans son propre sang s'évadant du trou causé par une balle de fusil dans son crâne aux ossements détruits. Des hommes des autorités policières se tenaient à côté du corps du défunt père d'une famille morte prématurément. Le jeune homme devait le traîner en justice pour le viol suivi de la mort de sa fiancée lorsque le paternel comprit qu'il devait finalement payé de ses actes, depuis longtemps rongé par ceux-ci en apprenant la vérité sur le décès de sa femme.

Les Hommes de la famille Nam étaient tous maudits et destinés à devenir des monstres les uns après les autres dans une spirale sans fin. Le grand père de l'héritier avait fait tuer la femme de son fils pour le détruire et son fils avait détruit ensuite la vie du sien. Chacun de ses hommes étaient source de force, de pouvoir et de finance londonienne. Ainsi, chacun d'eux étaient destinés à tenir la France entre leurs mains, trempant dans les affaires illicites. Ils étaient le mal même qui rongeait le pays jusqu'à la moelle.

"La prochaine fois que nous nous verrons, ce sera en enfer, père. Prends un paquet de carte avec toi. Tu iras là-bas avant moi."

Ces paroles revenaient inlassablement et sonnèrent comme des échos répondant à d'autres échos dont sa tête en était pleine à craquer à la vue du paquet de carte favoris de son géniteur, posé sur la table de son salon luxueux. Ce paquet avec lequel il deviendra le maître du jeu de nuit.
A peine habitué au temps dans lequel il siégeait, il fut finalement transporté dans un autre lieu. Celui où il avait rencontré sa belle pour la première fois. C'était une commémoration de remise des baccalauréats en France. Ils s'étaient mis à danser la valse au milieu de la pièce illuminée par des belles lumières venant mettre en valeur les beaux visages des deux tourtereaux incapables de cesser d'échanger leurs regards rêveurs l'un de l'autre, les mouvements des deux corps fins et allongés formèrent une symbiose parfaite à l'origine d'un souvenir qui l'était tout autant. Il avait finit de revivre l'entierté de ce doux souvenir que la boucle se répéta de sorte à ce que le souvenir recommença de zéro. Les premiers pas de la danse s'éxécutèrent et finirent par cesser. Recommencer puis cesser. Recommencer puis cesser.
Un amas de sang noirâtre coulèrent des yeux d'Anna, qui conservait toujours son sourire en regardant son cher et tendre.

"Qu'as tu fais pour moi quand ton père a abusé de moi, Nam ?"

La main de l'héritier se crispa sur la hanche de sa partenaire.

"Je répète Seung-Ji. Qu'as-tu fais quand ton père m'a violée ?"

Toutes les lumières finirent par s'éteindre sauf celle sur le couple. Il n'y avait plus personne sur scène sauf les deux réceptacles d'un amour damné. La jeune femme vint saisir le doux visage masculin de son homme avant de loger sa tête contre son cou déglutissant de mal-être.

"Aaah chéri... Qu'as-tu fais quand les contacts de ton père m'ont assassiné pour que je ne puisse plus jamais parler...?"

L'ensemble de la boucle se disproportionnait de plus en plus jusqu'à ce que l'ensemble soit brouillé. Finalement, la boucle se répéta une dernière fois. Les lumières éclairèrent une fois de plus le couple, laissant le richissime voir le visage de sa promise, du moins ce qu'il pouvait à peine en rester. Anna n'avait plus de visage. Seul demeurait un trou prépondérant à partir duquel on pouvait voir à travers. Le cycle se répéta une fois, deux fois, trois fois...

Désormais enfermé dans une chambre noire, il était encerclé de chacun de ses démons qui venaient le hanter en lui susurrant toujours les mêmes mots répugnants tout en touchant son corps de haut en bas, le forçant à se coucher contre le sol pour y être couché à jamais. Chaque fois il finissait par faire la même chose. Après des multiples heures de démence violente, le futur avocat se retrouvait à faire taire ces voix qui le hantait de force, déchirant leurs corps meurtris, frappant de toutes ses forces jusqu'à ce qu'il ne reste plus que des masses inhumaines et sanglantes, déformées par des coups de poings féroces et dévorés par une sombre rancoeur. A force de se débarrasser encore et encore de ses tortures, de ses chaînes asphyxiantes, un nouvel être avait finit par voir le jour. Ses cauchemars monstrueux étaient eux-aussi condamnés au passé. Il comptait désormais bien profiter de la vie comme il l'entendait. Un nouvel être pervers et narquois, prêt à accomplir son destin d'héritier de la famille Nam, à sa manière. Cependant, lui qui s'était juré de réformer ce monde pourris pour en bâtir un monde meilleur pour lui et lui seul fut pris dans le torrent de la jeunesse, oubliant peu à peu ses objectifs pour profiter enfin, finalement, de cette vie qui était jusque là un calvaire. Drogue dure, sexe, Seung-Ji ne pouvait plus se passer de son addiction à la cocaïne, l'alcool et couchait avec bien plus de femmes qu'il ne pouvait en compter, en venant même à passer ses nuits les plus torrides avec les vampires les plus sexy de l'Ordre, se faisant connaître du monde obscure comme le meilleur coup de tous les humains, devenant ainsi la convoitise d'un bon nombre de créatures différentes, dans lesquels il trouve du bénéfice à en écarter les jambes, bénéficiant de la protection de ses conquêtes pour continuer leurs rapports, lui permettant de se droguer au sang de Vampire mélangé à l'ecstasy, son cocktail destructeur.

"Vous les vampires vous semblez jeunes mais au fond vous n'êtes que des vieux croulants. Vos femmes baisent avec moi, le beau et jeune riche Nam et si vous voulez me niquer il vous faudra toute une armée pour m'enculer." - Nam Seung-Ji.